Pour vous parler de cette magnifique journée, nous laissons la plume à Évelyne de Pontbriand :
Le 18 juillet 2016
Le soleil se lève à peine sur les coteaux et la famille David Lecomte s’active déjà pour accueillir la 5° édition de la Paulée de l’Anjou noir au Château de Passavant dans le Haut Layon. Un long chemin a été parcouru depuis que Jo Pithon a rassemblé une petite équipe (Patrick Baudouin, Thomas et Charlotte Carsin, Paul-Eric Chauvin, Anne Guegniard, Evelyne de Pontbriand, Didier Richou et Jean François Vaillant) avec l’idée de décliner la Paulée de Meursault sur les bords de la Loire, afin de donner de l’image aux grands vins d’Anjou si peu connus, si peu reconnus. Avec quelques soixante cinq participants la première fois, dans un grand bâtiment entre barriques et palettes, à la bonne franquette, la Paulée de l’Anjou noir est devenue un événement majeur du vignoble angevin l’été. Aujourd’hui près de trois cents personnes randonnent par petits groupes avec des vignerons, avec cinq haltes leur permettant de découvrir, admirer, comprendre, apprendre, le paysage, l’histoire, le travail du sol, le chenin, la biodynamie, Foulques Nerra.
Les longues caves voûtées de la forteresse résonnent des commentaires élogieux des dégustateurs venus d’ici et d’ailleurs comme l’équipe de Michèle Vételé, sommelière d’Anne de Bretagne, ambassadrice de longue date des vins de Loire, Jérome Vrignaud du Château de Noirieux, Patrick Rigourd , grand caviste d’Angers, Georges et Bertrand Jallerat, propriétaires du Grand Monarque à Chartres, des journalistes comme Jean-Claude Bonnaud (Le vin Ligérien).
La dégustation des blancs a mis en valeur les grands chenins, secs ou moelleux, de ces coteaux de schiste, du Layon, de l’Aubance, de Savennières. Il est évident que si la région avait depuis des siècles une forte réputation de vins moelleux, les chenins secs, qui correspondent plus à la demande du marché d’aujourd’hui, sont éblouissants de fraîcheur, de finesse, de complexité. A la suite des vignerons de Savennières qui depuis les années 70 ont décidé que leur appellation pouvait officiellement produire des vins secs, quelques vignerons audacieux, talentueux et courageux produisent maintenant ce qui devrait être reconnu comme des Coteaux du Layons secs, des vins fins, précis, et élégants. La Paulée est la vitrine de cette réussite. Les Cabernets Francs vinifiés souvent maintenant en « infusion », sans soufre, délicatement, se sont bien éloignés des vins tanniques et asséchants d’antan.
Le déjeuner sous la grande toile blanche est créatif, ravissant, fleuri, les entrées poétiques, les cochons grillés et les fromages locaux font le bonheur des buveurs affamés vers trois heures de l’après midi après un moment émouvant, durant lequel chacun est remercié et en particulier tous ceux qui œuvrent depuis des années, voire des dizaines d’années pour la mise en valeur des vins de Loire.
L’exemple le plus spectaculaire est la fameuse Paulée de Chartres au Grand Monarque organisée depuis plus de trente cinq ans par Georges Jallerat et sa famille, avec un panache et une générosité exceptionnels. Tout ce qui compte dans le monde du vin en France est passé par cette Paulée toujours rythmée de tourbillons de serviettes de damas blanc au chant scandé « c’est la Paulée chez les Jallerat » avec une allégresse toute vigneronne. Chaque année s’y succèdent les chefs les plus prestigieux de France qui proposent un repas délicieusement gastronomique pour accompagner les nouvelles découvertes de la Loire que Georges a ainsi révélé année après année, à la presse, aux amateurs, aux écrivains, à de nombreuses personnalités, à la planète vin.
Ces Paulées sont nombreuses et s’exportent maintenant dans le monde entier. A New York, aux Seychelles et ailleurs, le vin se célèbre comme les collections de haute couture. Les flacons défilent, les millésimes, les goûts, les couleurs, les senteurs, les textures ne sont jamais ni tout à fait les mêmes ni tout à fait « les » autres. Ils réjouissent inlassablement les papilles et déchainent des passions.
Le soleil se couche sur la vieille forteresse qui a défendu tout au long de la journée la victoire des vins de l’Anjou noir dans le monde des grands vins. Tout le monde s’affaire à démonter la fête, le grand Belge Oosterlinck verse à flot sa bière des Flandres, en roulant les « r ». Le cuisinier poète crève son pneu dans un tournant raté. Au loin sur la muraille, plume au vent, le chevalier Lecomte sourit, content.
A lire :
D’Aliénor d’Aquitaine à Curnonsky. Jean Claude Bonnaud
Passavant Castrum. Isabelle Gaborit David
Sur la géologie de l’Anjou : http://www.parc-loire-anjou-touraine.fr/fr/telechargements/paysages/tvb/fichetvb-couloirdulayon.pdf
Sur le cépage chenin : http://sd-6.archive-host.com/membres/up/b974e387d89e01f29b3151906ba7527c7fd257ad/Actes_Journee_detude_Chenin_du_28_aout_2015.pdf
La cuisine était signée : Sofiàn Naït-Bouda Les Lisières
Les fromages venaient de la ferme de Bellis Perennis
Le pain du Fournil de l’Aubance
Les cochons de …..
Les vins….devinez !